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Comment un oiseau sauvage a fait alliance avec des chasseurs de miel

C’est un vrai conte de Noël. « Il était une fois un oiseau d’Afrique qui, il y a fort, fort longtemps, avait fait alliance avec l’homme… » La suite est aussi féerique. La créature ailée, en effet, raffolait de la cire d’abeille. Dénicher les ruches sauvages tapies au creux d’un arbre, ce lui était chose aisée ; le chétif volatile, nonobstant, se défiait de l’insecte piqueur. Le bipède aux mains agiles, de son côté, se régalait du miel de ces hyménoptères ; encore lui fallait-il localiser leurs logis. Las, il était nigaud en l’affaire, mais se montrait fort habile, une fois l’antre de ces butineuses démasqué, à enfumer l’essaim et piller leurs trésors.
Compère oiseau et compère Homo, un beau matin, scellèrent donc un accord tacite. A charge pour l’oiseau de guider l’homme vers les ruches ; en retour, celui-ci récompenserait son pilote emplumé en lui faisant offrande de fragments du festin – des rayons de cire. Sans oublier, bien sûr, de s’emparer au préalable de la précieuse substance ambrée.
Une fable pour enfants ? Non. L’histoire est même si véridique que la revue Science, le 8 décembre, en relate un épisode. Cet oiseau rare, c’est le grand indicateur (Indicator indicator), une espèce endémique en Afrique subsaharienne – et l’un des rares volatiles capables de digérer la cire. L’œil rond, le ventre blanc, l’épaule éclaboussée d’une tache jaune et le dos paré de plumes noisette… sous ses 50 grammes, le finaud cache bien son jeu.
Car le pacte qu’il a signé avec les chasseurs de miel est proprement exceptionnel. Dans la nature, il existe certes de nombreux exemples de mutualisme entre deux espèces sauvages : une relation durable, bénéfique aux deux partenaires. Mais, ici, notre oiseau n’est ni domestiqué ni contraint. On ne connaît qu’un seul autre cas de mutualisme entre un homme et un animal sauvage : il s’agit des dauphins qui chassent les bancs de mulets vers les filets des pêcheurs, sur les côtes du Brésil, par exemple.
Dès 1588, un missionnaire portugais, Joao dos Santos, avait observé un de ces impudents volatiles boulotter les cierges de son église, dans l’actuel Mozambique. Il décrira ensuite son improbable alliance avec l’homme. Mais l’histoire semblait trop belle ! Sa véracité ne sera reconnue qu’en 1989, grâce aux observations de terrain de deux naturalistes, au Kenya.
Depuis, la science a progressé. Les auteurs de la nouvelle étude se sont rendus au Mozambique et en Tanzanie pour y suivre, respectivement, le peuple yao, une culture bantoue, et le peuple hadza, des chasseurs-cueilleurs. Chacune de ces ethnies utilise un son spécifique pour appeler l’oiseau. Les Yao lancent un trille bruyant, suivi d’un court grognement – de type « brrr-hm » –, tandis que les Hadza émettent un sifflement mélodique.
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